3 - Matt prend le large de Jack Beagle (Extrait)
Prologue
— RBO-Radio Best Of, votre webradio, il est neuf heures ! Voici les actualités présentées par Arnaud Bol…
Matt Borel referma son ordinateur. Il avait décidé de prendre des vacances et désirait se couper totalement du monde extérieur.
La croisière en Méditerranée qu’il avait envisagé de faire avec Liloo, sa secrétaire et amie, devait être la plus calme possible. Pas d’enquête, pas d’espions, pas de meurtres ! Rien ! Nada ! Que tchi !
Ce devaient être les vacances les plus paisibles qui soient ! Il devait bien ça à Liloo ! Elle lui avait sauvé la vie en recevant la balle qui lui était destinée. Et, bien que rapidement remise de sa blessure, heureusement superficielle, elle restait encore sous le choc. Quant à lui, il avait eu si peur de la perdre !
Il monta sur le pont du bateau de croisière « La Précieuse » pour admirer le coucher de soleil qui faisait briller la mer Méditerranée de mille feux.
En attendant Liloo qui devait le rejoindre, Matt s’accouda sur le bastingage et se remémora leur retour de Boslavie.
Première partie : Embarquement immédiat…
Chapitre 1
— Par les pouvoirs qui me sont conférés, je vous fais chevalier de l’ordre de Saint-Barthélémy.
Ces mots résonnaient encore dans les oreilles de Matt Borel. Il était si fier de la distinction que lui avait remise le prince Miroslav, qu’il ne manquait pas une occasion de s’admirer dans une glace, en arborant la médaille de l’ordre le plus prestigieux de Boslavie. Il essayait d’adopter des postures nobles et fières, mais ne parvenait toujours pas à se sentir à l’aise.
Avec l’aide de Liloo, sa fidèle secrétaire, et de son ami, le professeur Bornellier, il avait réussi à démanteler un réseau de faux-monnayeurs et à sauver le couronnement du prince Miroslav, le cousin de Liloo.
Bien sûr, tout cela n’aurait pas été possible sans le concours de Sophia, la sœur du haut dignitaire boslave et, de surcroît, directrice des services secrets de Sa Majesté. Elle lui avait été d’un grand secours et avait quelque peu semé le trouble dans l’esprit de Matt.
Bien que leur ennemi Aldrich Von Strabism ait pris la fuite, le résultat n’était pas si mal et Matt savait que son équipe et lui n’avaient pas démérité.
Bien calé sur son fauteuil, les pieds sur son bureau, Matt savourait un scotch, du Highland Park, son péché mignon. Il s’était calmé sur la bouteille depuis sa rencontre avec l’ancien président des États-Unis, mais appréciait de temps à autre un petit verre de ce doux breuvage que n’auraient pas renié Humphrey Bogart et Robert Mitchum.
Jusqu’alors, il n’avait jamais quitté Marseille et son travail avait surtout consisté en des filatures et des flagrants délits d’adultère. Mais voilà, depuis son enquête sur la comtesse Valeria Roma-Nova*, il s’était retrouvé mêlé à des aventures qui l’avaient bringuebalé aux quatre coins du monde.
Décidément, la vie était pleine de surprises. Surtout depuis qu’il avait eu la bonne idée d’embaucher Liloo. De son vrai nom Sandrine Sido de Giverny, comtesse de l’Île-Aux-Moines, elle lui avait permis d’accéder à un monde qui lui avait jusque-là été étranger. Un univers de puissants où l’argent et la quête du pouvoir déchaînaient les instincts les plus vils.
Il se demandait souvent pourquoi elle avait accepté ce job de secrétaire payé au lance-pierre alors qu’elle avait les moyens de vivre très confortablement.
* Tout cela a été relaté dans : Matt et le président et L’affaire Miroslav
Elle était très belle et pouvait avoir tous les hommes à ses pieds si elle le souhaitait. Pourtant, elle se montrait souvent jalouse dès qu’une autre femme essayait de lui tourner autour.
Matt faisait mine de ne pas s’intéresser à elle, même s’il la trouvait désirable. Elle avait maintes fois été le témoin de ses frasques amoureuses et de ses nuits alcoolisées, alors que pourrait-elle attendre de lui ? Il préférait penser que c’était seulement son désir de mener une vie aventureuse qui l’avait conduite jusqu’à lui.
Il avait eu très peur lorsqu’elle fut blessée en Boslavie*. Il lui avait crié son amour. L’avait-elle entendu ? Était-elle alors évanouie ? Il l’ignorait.
Matt se redressa et alluma son ordinateur. La photo du Vieux-Port dominé par la Bonne Mère s’afficha à l’écran.
— Bon… C’est pas tout ça, mais je lui avais promis qu’on partirait en croisière ! pensa-t-il tout haut en pianotant sur son clavier.
Au bout d’une petite heure de recherches, il finit par trouver une formule tout compris en Méditerranée sur le « CSM La Précieuse » – avec escales à Gênes, Malaga, Casablanca, Lisbonne et Barcelone.
* Toujours dans L’affaire Miroslav.
— Deux cabines individuelles avec balcon... Voilà une croisière qui devrait nous remettre rapidement sur pied et nous faire oublier les derniers événements.
Il sortit sa carte bancaire et commanda en ligne les deux billets. Avec ce qu’il avait gagné avec le président Obamo et le prince Miroslav, il pouvait se permettre de belles vacances avec Liloo.
Mais voudrait-elle venir ? Il eut un moment d’hésitation. Elle ne devrait pas refuser, elle qui le traitait souvent de radin. D’ailleurs, il devrait rapidement être fixé, car elle devait venir au bureau aujourd’hui. Après leur retour de Boslavie, elle avait désiré rester chez elle une semaine afin de se remettre complètement de sa blessure.
— Cette croisière devrait finir de la rétablir définitivement, pensa-t-il.
Il entendit une clé actionner la serrure de l’entrée.
— C’est vous, Liloo ?
Il l’entendit refermer la porte.
— J’ai une surprise pour vous ! enchaîna-t-il.
— Moi aussi, répondit-elle en entrant dans le bureau.
— Ah bon ! dit-il, étonné. Un cadeau pour moi ?
— Oh non, je ne suis vraiment pas un cadeau ! répondit une petite voix féminine cachée derrière Liloo.
— Je vous présente Manon, ma nièce ! dit Liloo, en la poussant énergiquement devant elle.
Chapitre suivant
— Votre nièce ? demanda Matt, tombant des nues. Mais que fait-elle avec vous ?
— Eh bien, figurez-vous que mon frère…
Matt écarquilla les yeux.
— Vous avez un frère ?
— Parfaitement. Je ne vous ai pas parlé de lui ?
— Non, pas du tout ! Je ne savais pas que vous en aviez un !
— Eh bien oui, j’ai un frère. Et celui-ci a une fille de douze ans, Manon, que voilà.
— Et... ? balbutia Matt, hésitant.
— Et il m’a demandé de bien vouloir la garder pendant quelques semaines…
— Mon père est en déplacement pour son travail et il ne pouvait pas m’emmener, enchaîna la gamine.
Matt ne la quitta pas des yeux. Il la vit avec effroi s’approcher de sa bibliothèque et s’empressa de déplacer les figurines des étagères. Sans hésiter, elle prit un livre et commença à le feuilleter.
— On ne touche pas et on remet tout en place, intima-t-il avec force.
— Ben quoi ? C’est juste une BD.
— Ce n’est pas n’importe quelle BD. C’est de ma collection mythique de Strange qu’on parle… Toute mon enfance.
(à suivre)